Note d’Oncle Max – 28/12/2019
Meilleurs Vœux pour 2020
Réflexions de fin d’année sur 2 sujets controversés (parmi d’autres) :
2 questions reviennent périodiquement sur la table et en particulier en ce moment :
Faut-il traiter contre le varroa ? Faut-il donner un complément de candi aux colonies ?
Préambule général sur la conduite de colonies :
Je pars de ma position simpliste vis-à-vis du varroa. Je ne suis ni biologiste, ni vétérinaire ni zootechnicien diplômé. Je suis mon intuition d’après ce que j’ai observé/constaté en élevage dans ma carrière à l’étranger et en Belgique. Ces notes qui suivent n’engagent que moi.
Les moutons Soay (race très rustique) ont aussi des verminoses récurrentes impossibles à détecter sauf lorsqu’il y a forte infestation et diarrhée, mais je traite le moins possible pour qu’ils créent leurs propres défenses. Bien sûr il y a d’autres races très productives mais beaucoup moins rustiques, ni économes en pâturage et qu’il faut vermifuger 3, 4 ou 5 fois par an. S’il y a un mouton qui a trop de verminoses, je l’élimine car cela ne sert à rien, génétiquement parlant, de reproduire des lignées avec des faiblesses de résistances, c’est contre-productif et cela peu propager des caractères faibles dans sa descendance (désolé pour cette forme d’eugénisme naturel).
Comme avec mes moutons, je fais le minimum pour réduire la pression des varroas sur mes colonies et j’écarte les colonies d’abeilles trop infestées : dans la nature celles qui sont trop sensibles au varroa disparaîtraient naturellement. NB : j’écarte également celles qui sont trop défensives et, si possible, celles qui ne sont pas assez économes avec leurs réserves.
A nous de sélectionner les colonies porteuses de bons gènes et supprimer les autres pour ne pas relâcher dans la nature des faux-bourdons avec des gènes non désirables. NB: celui qui garde des colonies peu résistantes au varroa laisse s’échapper dans la nature des faux-bourdons porteurs de cette faiblesse génétique pour les autres colonies. C’est le contraire de ce que veut faire AristaBee research, c’est à dire disperser à terme dans la nature des faux-bourdons porteurs de gènes résistants aux varroas….
1. Traitement contre le Varroa :
Pour lutter contre les varroas, il n’y a pas de réponses toutes faites ni de prescription standard. Le tout est de savoir s’il est absolument nécessaire de faire un traitement et, si oui, quand et avec quelle substance ou même avec quelles méthodes biologiques. Cela fait l’objet de beaucoup de discussions et cette note-ci n’est qu’un rappel partiel de ce qui a déjà été dit et écrit maintes fois sur le sujet.
Eradiquer le varroa n’est pas envisageable pratiquement car il existe de nombreuses colonies sauvages dans des bâtiments ou des arbres creux. De plus, les varroas sont d’excellents voyageurs parasites qui passent d’une abeille à l’autre (même en faisant une pose sur une fleur). Mais il faut éviter une trop forte propagation dans chaque colonie. Donc, il faut essayer d’évaluer au mieux l’état d’infestation de chaque colonie, entre début juillet et fin septembre, car il est préférable de ne plus toucher aux colonies à partir de début octobre et que la grappe d’abeilles hiverne harmonieusement durant tout l’hiver sans être bousculée.
Déjà les traitements au thymol ne sont pas bien acceptés par les abeilles (perturbations olfactives principalement), mais les traitements hivernaux aux acides (oxaliques et formiques) ne seraient pas sans incidence sur les colonies d’abeilles. Les acides sont agressifs et pourraient endommager la chitine (peau) des abeilles et en particulier celle de la reine. Certaines études ont dit que cela affecterait la ponte de cette dernière.
Ce qu’il ne faut surtout pas oublier en hiver, c’est l’équilibre relativement fragile de la colonie qui a bien colmaté tous les interstices de la ruche et qui s’est mise en grappe pour hiverner en se protégeant du froid et de l’humidité. Les abeilles se sont bien organisées en prévision des périodes de froid. Ouvrir une ruche en plein hiver perturbe d’autant plus une colonie qu’en été. Toute perturbation entraîne un stress et des pertes énergétiques.
L’avenir c’est le développement des lignées d’abeilles domestiques européennes résistantes aux varroas (VSH) comme le sont les abeilles asiatiques qui vivent avec le varroa depuis toujours.
Mais, il ne faut pas rêver, ce n’est pas demain que nous pourrons avoir toutes nos abeilles résistantes aux varroas. Il faudra peut-être une décennie (ou deux) pour en arriver là. Entre-temps, il faut, d’une part, aider nos abeilles à se protéger d’un excès de varroas et, d’autre part, sélectionner nos colonies qui semblent déjà plus résistantes et supprimer celles qui paraissent être de véritables nids à varroas pour ne pas infester les colonies voisines.
Il me semble que la protection des abeilles doit se faire avec des produits « soft » et si possible écologiques qui ne puissent se retrouver indirectement dans le miel ou la cire, quitte à ne pas avoir la meilleure protection possible. Personnellement, je ne suis pas trop favorable à la lutte mécanique, à savoir la suppression des cadres à mâles, blocage de la ponte, etc…. qui perturbent l’équilibre naturel de la colonie. Si certains ont des cadres-témoins, ceux-ci sont souvent bâtis avec des cellules de mâles qu’on peut aisément extraire sans trop perturber la colonie. NB : pour mémoire, les varroas reproducteurs recherchent surtout les cellules de mâles.
2. Nourrissement « artificiel » complémentaire avec du candi
Tout d’abord il est important de préciser de quel type de colonie d’abeilles on parle : est-ce dans une ruchette MiniPlus sur 2 corps, une ruchette 5 ou 6 cadres en polystyrène ou en bois, une ruchette 7 cadres double parois sans ou avec hausse, une ruche Warré sur un, deux ou trois corps, une ruche Langstroth 10 cadres sur un ou deux corps ou encore une ruche Dadant 10 cadres (réduite ou non sur 8 cadres) sans ou avec hausse. Pourquoi cette liste exhaustive ? C’est pour vous dire que le volume dans laquelle une colonie sera hivernée (à partir de mi-juillet) est primordial pour sa gestion autonome.
En effet, la colonie a besoin:
1. d’un nombre minimum d’abeilles pour maintenir une température minimale de la grappe en hiver: http://www.cari.be/medias/abcie_articles/131_bio.pdf
2. d’un nombre suffisant de jeunes abeilles d’hiver pour redémarrer l’élevage au printemps
3. de suffisamment de nourriture (pollen et miel) comme réserves énergétiques non seulement pour les jeunes abeilles d’hiver mais également pour démarrer l’élevage au printemps si cette période est pluvieuse et trop fraîche (manque de floraisons hâtives).
4. D’une température hivernale suffisamment fraîche (moins de 7°C) pour ne pas sortir inutilement le jour et pas trop froide (au-dessus de -7°C) pour ne pas dépenser trop d’énergie pour maintenir la température minimale de la grappe en hiver.
Tous ces éléments indiquent que les abeilles recherchent un équilibre pour passer au mieux l’hiver dans les conditions qui lui sont données. A moins d’avoir des abeilles extrêmement sobres et un hiver très doux, je ne vois pas comment une colonie peut survivre naturellement (sans apport complémentaire) dans un seul corps de ruche Warré, un double corps Miniplus ou une simple ruchette 5 ou 6 cadres.
Quelle quantité de nourriture a besoin d’une colonie pour passer l’hiver ? Je n’en sais trop rien.
Disons que 1000 abeilles devraient avoir 1,5kg (1500gr) de réserve de nourriture pour passer l’hiver et que normalement 10.000 jeunes abeilles sont nécessaires pour redémarrer un élevage au printemps, la colonie devrait donc avoir 15 kg de réserve de nourriture au tout début de l’hiver. Nous savons qu’un cadre de corps bien rempli de miel/sirop pèse 4 kg. Il faut donc presque 4 cadres de corps libres pour stocker cette quantité.
Si le temps doux s’est prolongé en automne et que la reine a continué de pondre allègrement, où les abeilles vont-elles pouvoir stocker les réserves qu’elles trouvent encore ou qu’on leur apporte si la place est occupée en partie par le couvain ? Si dans une ruchette 6 cadres, 3 ou 4 cadres sont encore occupés par du couvain et 1 ou 2 cadres par du pollen, il ne reste plus beaucoup de cadres pour stocker du miel et du sirop. Un cadre de corps Dadant a +/- 4.000 cellules par face. Pratiquement le couvain couvre en fin d’été les 2/3 de la surface soit 2.500 cellules par face soit 5000 cellules par cadre. Donc, la colonie peut élever 20.000 jeunes abeilles d’hiver sur 4 cadres de corps, ce qui permet d’avoir une colonie suffisamment populeuse pour passer l’hiver et reprendre l’élevage au printemps. NB : en stimulant la reine à pondre 10 jours avant le nourrissement, les premières jeunes abeilles naissantes laisseront de la place pour la fin du nourrissement.
C’est ce questionnement sur le rapport entre le volume de la ruche, le nombre désiré de jeunes abeilles d’hiver et l’espace proportionnel pour stocker les réserves de nourriture qui m’a conduit à hiverner mes colonies, à partir de mi-juillet, sur un corps Dadant 10 cadres (réduit à 8 cadres + partitions) surmonté d’une hausse avec 8 cadres et 2 partitions (en rive). Avec les 8 cadres de hausse (équivalents à 4 cadres de corps), les abeilles peuvent stocker près de 12kg de réserves et avec 2 cadres de corps de miel, cela me donne 8 kg supplémentaires auxquels il faut ajouter 2 cadres de pollen ; ce qui nous laisse 4 cadres de couvain de jeunes abeilles d’hiver naissantes après le nourrissement d’hiver (fin d’été).
Ces calculs ne sont pas scientifiques mais des estimations brutes qui permettent d’évaluer les besoins de la colonie. Si vous décidez d’hiverner sur un seul corps Dadant 10 cadres ou sur un corps Langstroth 10 cadres ou encore dans une ruchette 7 ou 6 cadres, la colonie va en principe adapter son hivernage en fonction du volume disponible pour, en même temps, stocker des réserves et élever des jeunes abeilles d’hiver. Il suffit qu’elle élève trop et n’aie plus assez d’espace de stockage ou qu’à l’inverse elle stocke trop et n’ait plus assez d’espace pour élever des jeunes abeilles d’hiver que la colonie est dès lors compromise en cours ou fin d’hiver.
Aujourd’hui, pour plusieurs colonies (souvent populeuses), la question se pose sur les quantités de réserves disponibles jusqu’à la fin de l’hiver. Les frimas ne sont pas arrivés assez tôt et dans plusieurs colonies, la reine a continué de pondre inlassablement. Les ouvrières ont dû continuer à élever le couvain et à dépenser de l’énergie pour maintenir ce couvain bien au chaud car elles avaient déjà rejeté les mâles (dont c’est un des rôles dans la ruche). Peut-être ce travail supplémentaire a entraîné une consommation anormale des réserves hivernales.
Conclusion : Faut-il dès lors les aider ou les laisser se débrouiller toutes seules (au risque de les perdre) ? Celles qui ne sont pas trop populeuses et qui sont hivernées avec suffisamment de nourriture (dans une hausse Dadant ou un second corps Langstroth) pourraient s’en sortir sans appoint de candi. Mais les autres… tout dépend de la population de la colonie, des réserves qui leur ont été données et qui leur restent pour tenir jusque fin mars ou début avril et de la météo que nous aurons de début janvier à fin mars. NB: aujourd’hui, aux colonies dont la grappe est collée au couvre-cadres, je leur donne 500gr de candi (Apifonda) dans une petite barquette alimentaire. Je la remplacerai si nécessaire au fil des semaines à venir.